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... sur une table de dissection d'une machine à coudre et d'un parapluie.

En effet, quoi de plus surprenant, ici, que la première rencontre soit celle de ces étudiantes. Avec tous les a priori dans le sac à dos, les femmes devaient être voilées et rester chez elle, à la limite de la persécution. Hors de question de leur adresser la parole sous peine de je ne sais quoi. Lorsque dans le bazar de Shiraz l'une d'elle nous alpague, une goutte commence à faire son chemin sur ma tempe. Il fait une chaleur étouffante ici en été.

Loin de passer pour un autochtone, la couleur de ma barbe me trahissant, d'ailleurs la barbe tout court jure sur le visage poli à l'aftershave de tous les jeunes modernes, c'est mon acolyte, ressemblant plus à un boys band iranien qu'à un Irlandais, Russe, Allemand, voir Suisse des fois (!), qui s'est fait demander l'heure.

Pas encore à l'aise dans les formules de politesse ni dans le comptage des chiffres de 1 à 10 en farsi, la discussion s'est faite en anglais. On prend l'occasion pour en apprendre un peu plus sur les us et coutumes d'ici. Finalement, la plupart des jeunes étant habillés de jeans et de Air Max et ayant une coupe de cheveux rappelant la mode tektonik, les différences culturelles sont de l'ordre de la subtilité. La façon de claquer les doigts au rythme du dernier tube américain, comment passer la chicha à son voisin en lui tapotant la main, ou encore où se retrouver le soir entre jeunes : au centre commercial du coin où tout est fermé, pour les plus fortunés. Nous parlons également politique. Tous les avis convergent.

Le statut de la femme n'est en revanche pas simple, et diffère de celui qu'on connaît en occident, et dont elles sont évidement envieuses. Bien qu'ayant accès au travail et ayant des places recherchées par tous dans les administrations, certaines règles s'imposent à elles, souvent du jour au lendemain, sans réelle raison. Ou comment, pendant notre séjour, les femmes se sont vu interdire de fumer la chicha dans les lieux publics (fumer la chicha -Khalian- étant une activité conviviale pratiquée en famille et entre amis, très largement répandue dans le pays). De même l'obligation du port du voile, de la tunique, et l'interdiction de mettre en valeur son visage, en public, sont leur quotidien.

Évidemment, comme dans tout système totalitaire, tous les interdits sont outrepassés, et la coquetterie n'est pas moins présente : foulard de couleur à la mode, mèche de cheveux dépassant maladroitement du foulard, maquillage subtil, boucles d'oreilles à peine visibles, tout en connaissant le risque d'offenser la police des mœurs, les Bassidj.

Une façon de montrer son opposition au régime, de vivre sa vie comme celle de leurs parents plus jeunes.

Toutefois, c'est lors des au revoir que toute la complexité s'est révélée. Cueilli par une voiture de police à la sortie du café chicha où nous avions atterri en fin de soirée, ce qui fut un moment de rigolades et d'échanges interculturels s'est transformé en une panique incompréhensible. Pour nous, étrangers, car nous avions une mauvaise image de la police iranienne avec des risques aléatoires peu connus, mais qui font froid dans le dos, et pour elles parce qu'elles étaient conscientes de la barrière des interdits franchie et des conséquences : traîner, avec des garçons étrangers, la nuit, dans un café chicha, et maquillées, avec le risque d'aller en prison ! Au final, faisant profil bas (nous), ces fonctionnaires voulaient apparemment juste s'assurer que tout le monde arrive à bon port ...

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Iran, 2011